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Actualités.

16/02/2022

Partenariat Afrique - Europe : Pas de décision sur la société civile sans la société civile !

Le Cercle de Coopération des ONGD se joint à plus de 200 réseaux de solidarité internationale comme signataire de la déclaration conjointe de la société civile africaine et européenne à tous les Chefs d’État et de Gouvernement et aux Dignitaires participant au 6ème Sommet Union européenne – Union africaine qui se déroulera les 17 et 18 février 2022.

Les efforts déployés aujourd’hui par l’UA et l’UE pour créer un partenariat égalitaire et équitable sont ancrés dans le passé colonial et la coopération postcoloniale. Ils sont confrontés à des inégalités structurelles et systémiques entre les deux parties. Le succès des efforts d’aujourd’hui dépendra d’une reconnaissance du passé, de la prise de conscience du présent et d’un engagement en faveur d’une transformation mutuellement bénéfique tournée vers l’avenir. La construction d’un partenariat transformé nécessitera une approche de continent à continent ainsi qu’un engagement significatif avec des acteurs et actrices clés tels que la société civile dans toute sa diversité, avec une voix prioritaire pour les organisations populaires mandatées pour représenter des secteurs principaux de la population.

Il est extrêmement regrettable que, dans le cadre de leur partenariat, l’UE et l’UA n’aient pris contact avec les organisations de la société civile qu’au tout dernier moment, soulignant ainsi le manque d’inclusivité et de transparence du processus. Ce faisant, vous avez exclu les voix des millions de personnes qui seront directement affectées par les décisions que vous allez prendre. D’un autre côté, vous donnerez probablement la priorité aux intérêts de quelques-uns plutôt qu’au bien-être de la majorité et vous risquez de laisser des millions de personnes encore plus de côté. 

Nous, OSC africaines, européennes et de la diaspora, saisissons cette occasion pour exprimer notre inquiétude quant à ce processus aussi partial, qui ne peut que renforcer les déséquilibres actuels de pouvoirs et de privilèges. La participation des OSC est cruciale pour garantir que la coopération entre l’UA et l’UE promeuve des priorités communes, que les initiatives phares s’ancrent dans les réalités locales et les éventuelles solutions existantes, et qu’aucune personne ne soit laissée de côté. En l’état actuel des choses, l’UE continue d’ignorer les  priorités de l’Union africaine telles qu’elles sont définies dans l’Agenda 2063, sélectionnant uniquement les éléments qui lui conviennent. L’UE, malgré son engagement à forger un partenariat centré sur les personnes, ne semble pas mettre l’humain en premier. De son côté, la prise de décision politique de l’UA pourrait bénéficier d’un dialogue plus inclusif et transparent avec la société civile et les organisations populaires.

En raison de ce partenariat déséquilibré et de l’exclusion de la société civile, les résultats tant attendus du Sommet ne mettent pas suffisamment l’accent sur les problèmes systémiques prioritaires des pays africains, tels que le chômage généralisé, en particulier chez les jeunes qui représentent plus de 50% de la population, les relations commerciales déséquilibrées, les demandes d’annulation de dettes, la souveraineté alimentaire, l’accaparement des terres et des ressources, les violations des droits humains – y compris les droits économiques, sociaux, culturels, civiques et politiques – la crise climatique, la perte de biodiversité et l’inégalité en matière de vaccins et de médicaments.

L’exclusion de la société civile est symptomatique du passé et du présent, mais il est encore temps d’utiliser l’actuel Sommet UA-UE comme un moment de transformation vers l’avenir.

LES PRINCIPALES DEMANDES DE LA SOCIÉTÉ CIVILE

Le partenariat UA-UE devrait être fondé sur l’égalité, l’inclusivité, la responsabilité mutuelle, les valeurs partagées et la prospérité. Une réinitialisation du partenariat est nécessaire de toute urgence. À cette fin:

  1. L’UE et l’UA doivent s’efforcer de dépasser et abandonner le traditionnel cadre donateur-bénéficiaire, colonial et postcolonial Nord-Sud, sur lequel les relations ont jusqu’à présent été établies. Cela doit impliquer un examen approfondi des problèmes systémiques et structurels qui sous-tendent la relation actuellement déséquilibrée entre l’UA et l’UE – dans des domaines tels que les relations commerciales, la dette, les flux financiers illicites – et qui exacerbent plutôt qu’ils n’améliorent l’équité de la gouvernance internationale. Les règles régissant l’ordre mondial doivent être établies équitablement et démocratiquement. Le respect et la promotion des droits de l’homme universels doivent être au cœur du partenariat stratégique UE-UA. Cette réévaluation devrait également aborder la reprise post-COVID19 et les priorités communes telles que l’accès équitable aux vaccins COVID19, l’amélioration du développement humain, la promotion de l’égalité de genre, la lutte contre la crise climatique et la réduction de la dépendance de l’Afrique des importations alimentaires.
  2. L’UE et l’UA doivent établir des mécanismes de gouvernance clairs au sein desquels la redéfinition du concept de partenariat, englobant une large approche multi-acteurs et actrices; une prise de décision conjointe via des processus transparents et participatifs; le partage d’informations accessible et disponible en amont; et des structures de mise en œuvre, de suivi et de redevabilité. Cela devrait inclure un engagement significatif et à long terme avec les OSC africaines, européennes et de la diaspora. Les voix des personnes les plus touchées par les décisions doivent être au cœur d’un partenariat UA-UE efficace et transformationnel. Le partenariat devrait renforcer le rôle des politiques publiques et réguler efficacement l’influence et les investissements du secteur privé. La mise en place de tels mécanismes de gouvernance devrait commencer par un accord sur un système inclusif de suivi et de redevabilité concernant les résultats de ce Sommet.
  3. Le partenariat UA-UE doit reconnaître et s’appuyer sur la diversité, les connaissances et les compétences des continents africain et européen. À cette fin, l’UA et l’UE, en dialogue avec les organisations de la société civile, les communautés économiques régionales et les autorités locales, devraient établir une feuille de route claire pour respecter et mettre en œuvre le programme de localisation, en garantissant un transfert de pouvoir et de ressources aux acteurs et actrices locaux qui sont directement impliqués, pour assurer le progrès politique, social et économique d’une nation, tout en respectant les limites écologiques planétaires. Dans toutes leurs décisions et actions, l’UE et l’UA doivent reconnaître et promouvoir les droits humains, une approche centrée sur les personnes, et des économies sociales et solidaires ancrées dans les territoires.

Retrouvez la liste des signataires ici.